Sören : l’avis d’un repenti

Bonjour,

Je suis contre l’ « obligation de casque », mais aussi contre la « promotion de casque », et contre la « recommandation de porter un casque » et autres « conseil de porter un casque », « pression sociale en faveur du casque » ou « pression juridique (assurances !) en faveur du casque » et finalement contre le casque lui-même, tout cela malgré le fait que j’en ai porté un pour tous mes trajets à vélo pendant plus d’une année. J’avais acheté un casque pour être raisonnable, être un bon exemple et réduire les risques, et je pensais qu’un vrai cycliste porte un casque et que mon cerveau doit être protégé.

J’avais cru les conclusions  de la promotion professionnelle et du bon sens :

1. Il y a beaucoup d’accidents en vélo,
2. La plupart des accidents provoquent des blessures à la tête,
3. Le casque me protège contre ces dangers,
4. De toute façon le port du casque ne peut pas faire de mal,
5. Il faut être un bon exemple.

Comme c’était le tout début du casque de vélo en Allemagne, je voyais de plus en plus de cyclistes en porter un et il m’arrivait même de convaincre d’autres cyclistes de l’utilité du casque. Mais avec le temps j’ai eu de plus en plus de doutes sur le bien-fondé de ces arguments : en effet si je me protège avec le casque « contre les accidents », alors les voitures peuvent rouler plus vite, me doubler plus près et prendre « un peu » plus de risques, parce que je suis protégé ! Autant que je sache ce phénomène s’appelle « compensation des risques ». C’est alors que le doute surgit : suis-je vraiment plus en sécurité avec un casque que sans casque si les risques sont compensés par le comportement des conducteurs ? Dois-je me sacrifier pour que les conducteurs de voitures arrivent plus tôt à leur destination ? Ne serait-il pas plus judicieux de réduire la vitesse des voitures ?

Un jour je n’ai pas retrouvé mon casque. J’ai eu beau le chercher partout, il avait disparu. Je me sentais mal à l’aise de rouler sans casque, mais avec le temps je me suis mis à profiter de la liberté, plus besoin de garder le casque quelque part, d’y penser, de faire attention de ne pas l’oublier. Depuis, je roule sans casque et je suis de plus en plus convaincu que c’est une bonne chose.

Dès mon arrivé à Paris j’ai vu que la culture était différente : « un cycliste est un sportif », « le vélo est dangereux », « le vélo est fait pour se promener à la campagne », « vélo = Tour de France ». Bien que j’aie adhéré à MDB pour « me promener à la campagne », j’ai finalement commencé à lutter pour que l’image du vélo en Île-de-France évolue vers « vélo = déplacement pratique ».

Entre autres, la question du casque et l’obligation du casque en Australie m’a motivé pour étudier plus en détail ce sujet, et j’ai commencé à douter du bon sens de la formule « le port du casque ne peut pas faire de mal ».

J’ai lu le dossier de la Fubicy, de la documentation anglophone et germanophone et mes conclusions ne laissent pas de doute : « le port de casque fait du mal ! » Il fait du mal au cycliste qui le porte, il fait du mal à tous les autres cyclistes et il fait du mal à la société. Les seuls qui en profitent sont l’industrie, Décathlon et Go Sport.

Pour reprendre les cinq points de la promotion du casque :

1. Il y a beaucoup d’accidents en vélo :
Totalement faux, c’est légèrement plus dangereux que de se déplacer en voiture. Les activités quotidiennes les plus dangereuses sont descendre les escaliers et faire des travaux domestiques. Pourquoi ne pas porter de casque dans la cuisine et dans les escaliers ?

2. La plupart des accidents provoquent des blessures à la tête :
Ici aussi, les statistiques parlent contre cette thèse. Les blessures à la tête sont rares et très souvent combinées avec des blessures mortelles dans d’autres parties du corps. Plus de 80 % des blessés à la tête sont des passagers de voitures, après viennent les motards et ensuite les piétons et cyclistes, pourquoi pas de casque pour les passagers des voitures et les piétons ?

3. Le casque me protège contre ces dangers :
Tout d’abord : le casque n’évite pas des accidents, il pourrait être le dernier maillon si toutes les mesures de sécurité routière échouent. Deuxièmement : les normes des casques de vélo n’assurent pas du tout une protection du cerveau. Un casque est fabriqué pour absorber l’énergie d’un objet de 5 kg (= tête) qui touche le sol ou un mur à une vitesse de 25 km/h, si on calcule l’énergie qui absorbe le casque le résultat est 147 joules. Pour cela les constructeurs écrivent « jusqu’à 25 km/h ». Mais attention : si la tête est déjà séparée du reste du corps le casque n’a plus d’utilité. […]

4. De toute façon le port de casque ne peut pas faire de mal :
Erreur !

a) Il augmente le risque d’accident pour l’individu : mon impression est que les porteurs de casque – surtout les jeunes porteurs – prennent plus de risques quand ils portent un casque. Par ailleurs les conducteurs de voitures frôlent d’encore plus près (voir l’étude de Ian Stewart) et mettent plus en danger les « casqués » que les « non-casqués ». C’est la psychologie du trafic qui joue son rôle, on adapte son comportement aux dangers discernés dans une situation donnée. […]

b) Il augmente indirectement le risque pour les autres cyclistes : chaque cycliste avec casque fait une promotion du casque de vélo et en même temps souligne l’image de dangerosité du vélo urbain. Il augmente ainsi le nombre de citoyens qui renoncent au vélo, et cela a deux effets pervers : il y aura plus de voitures/motos/taxis donc plus de danger dans les rues et il y aura moins de cyclistes dans la ville donc plus de danger pour les cyclistes restants. Il s’est avéré que dans les villes avec beaucoup de cyclistes il y a moins de risques à se déplacer en vélo. […]

c) Plus il y a de cyclistes casqués plus nous nous rapprochons d’une obligation du port du casque par la loi ou une obligation « de fait » par les assurances et les tribunaux qui jugeront « risqué » de rouler sans casque. […]
Les conseils de la prévention routière « Le casque n’est pas obligatoire, mais indispensable » poussent dans le même sens : « Ne faites pas de vélo, c’est trop dangereux. » Ils devraient dépenser leur argent ailleurs.

5. Il faut être un bon exemple.
À l’époque où je portais un casque je me suis considéré comme un bon exemple, c’est fini, le casque fait du mal. Je « tolère » les cyclistes qui portent un casque, mais je ne les considère plus comme un bon exemple. Le mieux serait en fait un casque invisible.

Bonne route !

NDLR. À MDB nous partageons la plupart des arguments de Sören, seule la partie sur l’efficacité du casque est discutable : si le casque ne protège certes pas autant que l’on pourrait le souhaiter il remplit néanmoins son rôle de façon correcte lorsqu’il s’avère utile.

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