Les voies sur berges rive droite

Parmi les insultes multiples que la ville a subies dans les années de son « adaptation à la voiture », la mise en place d’une voie autoroutière en son centre, dans le lit même de son fleuve, n’est certainement pas des moindres. Le Francilien d’aujourd’hui, ne se souvenant pas toujours qu’il y eut autrefois autre chose, pourrait être tenté de penser qu’après tout, on peut vivre avec, que cela ferait partie du paysage, au même titre que le Louvre ou le Pont neuf.

Il nous faut cependant prendre le temps de relire les pages d’histoire que nous a léguées cette période faste et funeste à la fois. Nous redécouvrirons alors l’absurdité du plan autoroutier pour Paris, qui prétendait y dérouler une autoroute à la place du canal Saint-Martin, une autre dans la Seine au pied de Notre-Dame, et plusieurs autres encore en lieu et place du tissu urbain existant, quand il n’existait rien pour guider les axes souhaités. Nous nous interrogerons, bien sûr, sur les causes de l’aveuglement par lequel nos prédécesseurs ont cru voir là l’image du progrès. Nous serons tentés, sûrement, de les moquer ; et nous nous féliciterons de ce que les plus monstrueux de leurs projets aient été arrêtés à temps.

Mais il nous faudra aussi reconnaître que la plus grande part du plan rêvé par nos prédécesseurs a en fait été réalisée : les aménagements autoroutiers du bord de Seine, depuis le quai de Bercy jusqu’au pont du Garigliano, et, surtout, le boulevard périphérique, en sont la partie la plus apparente. S’y ajoutent de multiples éléments moins visibles, car fondus dans le décor de notre vie quotidienne, mais tout aussi déterminants : l’envahissement généralisé des chaussées par les voitures, en circulation comme en stationnement, l’organisation de la voirie en vue du seul objectif de maximiser les flux motorisés (avenues mises en sens unique, multiplication de carrefours à feux gérés sans aucune considération pour les usagers non motorisés, etc.) et, surtout, l’envahissement des consciences par un ensemble de préjugés selon lesquels l’autosolisme serait le mode premier et primordial de déplacement.

Face à cette situation, la facilité consisterait à faire comme si de rien n’était, à nier ou à minimiser l’agression continuelle imposée par la circulation motorisée, à la considérer, en somme, comme une forme de fatalité plutôt que comme la conséquence de choix politiques passés. Une conception pleine et entière de l’action politique ne saurait cependant se résoudre à ce laissez-faire coupable : sauf à réduire la politique à une accumulation d’ajustements à la marge et d’actions de calinothérapie trop limitées pour avoir prise sur le réel, la situation actuelle de la voirie parisienne appelle nécessairement une action forte et déterminée.

La décision de mettre fin à la circulation automobile sur une partie substantielle des voies témoigne incontestablement d’une volonté de se diriger vers un usage de la voirie plus raisonnable et efficace.

MDB, association de cyclistes urbains de plus de 1 000 adhérents, salue cette décision, et rappelle l’ampleur des transformations qui seront à opérer pour accomplir pleinement la tâche dans laquelle cette décision s’inscrit.

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