Grossesse : j’ai momentanément renoncé au vélo

Témoignage de Nathalie Bouscaren

Je suis arrivée en région parisienne il y a environ six ans. Le vélo au quotidien, je le pratique depuis 18 ans, soit la moitié de ma vie ! J’ai chuté deux fois toute seule, une fois le long d’un canal en regardant ailleurs et une autre fois en arrivant un peu trop vite sur un ponton en bois humide. Je n’ai donc jamais considéré le vélo comme un moyen de locomotion dangereux. En arrivant en région parisienne, le trafic, les 2×2 voies de la banlieue sud où j’habite et les paroles de mon entourage ont quand même fait de moi une cycliste casquée. Je me sentais rassurée et sûrement mes proches aussi. Il y a bien des situations durant lesquelles le vélo est une source de stress, lorsqu’il y a de la tension et du monde sur la route mais globalement, je trouve la circulation en région parisienne convenable. J’aurai une préférence pour des voies de vélo séparées de la route avec de la verdure tout autour, un peu comme la coulée verte Montparnasse-Massy mais en plus rapide (pour les trajets quotidiens, sans chicane et sans piéton). 

Cette petite introduction pour vous montrer que, même avec mes 30 kilomètres quotidiens, le vélo est selon moi le mode de transport le plus intéressant en région parisienne : on évite la cohue du RER et des métros aux heures de pointes, on fait de l’exercice physique avant de s’enfermer dans des bureaux et on a un sentiment de bien être inégalable. 

Depuis le début de ma grossesse, l’intérêt mon entourage (qui ne fait pas de vélo quotidiennement) quant à ma pratique du vélo s’est fait sentir : « le vélo c’est dangereux », « il y a des risques de chute », « le centre de gravité change », « tu peux avoir un accident », etc. Bref, il faut stopper le vélo et le plus tôt étant le mieux, la culpabilité et une petite pointe d’inquiétude se sont immiscées dans mes trajets quotidiens.

Plusieurs arguments plaident en faveur du vélo :

  • Pendant mes trajets, mon petit bonhomme ne bougeait pas. Peut-être que le vélo le berce ou qu’il ressent mon bien être ?
  • Je maintiens une activité non traumatisante pour mon dos, ma vigilance s’est accrue pour éviter les trous, observer les divers éléments sur ma route et anticiper les faits et gestes des autres usagers de la route, chose que je faisais déjà naturellement.
  • Le vélo me permet d’être autonome dans mon quotidien, n’ayant pas de voiture et n’ayant pas tout à portée de transports en commun, son utilité au quotidien n’est donc pas à remettre en question.

Et puis, même si à l’époque où la voiture n’était pas encore reine et que le vélo était un des principaux moyens de transports, il y avait plus de fausse couche qu’aujourd’hui, je ne suis pas certaine que cela soit directement imputable au vélo (l’hygiène, la pénibilité du travail, les risques infectieux, etc.).  En période d’épidémie, les transports en commun ne me semblent pas les plus adaptés aux femmes enceintes.

Malgré tous mes arguments, mon entourage a eu le dessus sur mon vélo. Je l’ai relégué à des sorties occasionnelles sur de courtes distances au début de mon sixième mois de grossesse.  À force d’entendre les peurs de mes proches et principalement de mon conjoint, le doute et une pointe de peur se sont installés dans mes trajets. Cela fait deux mois que mes trajets quotidiens ne sont plus aussi fun qu’avant. 

Je comprends l’argument de sécurité mais je ne suis pas certaine que si l’on avait des pistes cyclables parfaitement séparées des automobilistes, les remarques changeraient. Je pense qu’en France, la pratique du vélo au quotidien et à tout âge, ce n’est pas encore dans nos mœurs. La voiture est omniprésente dans chaque famille et il est considéré comme un moyen de transport rassurant ! Tant que nous ne changerons pas de vision de ce qu’est la sûreté d’un mode de transport, nous ne pourrons pas mettre le vélo sur le devant de la scène. Pratiquer régulièrement le vélo, être responsable sur la route, laisser à chacun un espace de déplacement (véhicules motorisés, piétons, etc.) et voir le vélo comme un compagnon de route, voilà ce qui est le plus important et voilà ce qui permettra plus tard, aux femmes enceintes, le souhaitant, de maintenir leur pratique du vélo si elles se sentent suffisamment en forme et en sécurité pour le faire. Pour ma part, je pense que mon ventre aurait eu raison de ma pratique, à moins que j’investisse dans un vélo type hollandais pour la fin de ma grossesse, mais pas au début du sixième mois. Les mentalités sont longues à changer. Le jour où le nombre de cyclistes quotidiens aura dépassé celui des conducteurs de véhicules motorisés, le vélo enceinte ne sera plus un « risque » : ce sera juste normal et j’ai hâte de voir ça en région parisienne.

À quand les bouchons de cyclistes sur la RN20 ?

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