Les rues aux écoles se multiplient partout dans le monde depuis la crise Covid19. Pourtant, la ville de Boulogne-Billancourt refuse toujours de fermer la circulation dans les rues scolaires. Elles sont pourtant recommandés par le Cerema, agence de l’État chargé de l’aménagement des territoires. Il existe 2 formats. Une version temporaire à l’heure des écoliers. Une version définitive par piétonnisation et végétalisation de la rue. Ces 2 versions permettent de sécuriser les trajets des enfants. Au-delà de la sécurité routière, cela permet aussi de lutter contre la pollution de l’air et la sédentarité des enfants.

Regardons les exemples de plusieurs villes d’Île-de-France qui ont avancé ou pas sur le sujet depuis 2021.
#1 : La ville de Paris
À la rentrée de septembre 2025, la ville de Paris a apaisé un total de 300 rues scolaires. Ce sont ainsi 50% des écoles maternelles et élémentaires de la ville. La mairie a installé des barrières amovibles lorsque cela est possible. Elles permettent le passage des véhicules de secours et des services (collecte des ordures ménagères, etc.). Mais elles interdisent le passage des véhicules individuels motorisés ou des camions de livraison.
Quand des accès de riverains ou de commerces empêchent la fermeture de la voie, la piétonnisation se fait sans mise en place de barrières. Dans ce cas, seuls certains véhicules peuvent y circuler à la vitesse du pas. Les riverains pourront toujours accéder à des parkings situés dans la voie. Les livraisons pour des commerces situés dans la voie peuvent se faire sous dérogation… Les piétons sont prioritaires sur l’intégralité de la voie.
Parmi les 300 rues aménagées, 100 « rues aux écoles » bénéficient d’un programme d’aménagement spécifique. L’aménagement piétonnier se fait en revêtement clair. Lorsque c’était possible techniquement, la ville de Paris a installé de vastes espaces végétalisés pleine terre avec plantations d’arbres. Ces aménagements participent à la réduction des îlots de chaleur nocturnes.


#2 : La ville de Puteaux
Dès 2021, la maire de Puteaux a lancé le dispositif de rues en fermant la circulation aux heures des écoliers. La ville a installé des barrières activées par les ASVP fermant la circulation pendant 30 minutes. Au total sur la mandature, la ville de Puteaux a créé 6 rues scolaires.
Ce dispositif lancé en 2021 consiste à piétonniser les rues des écoles, provisoirement, aux heures des écoliers. Les « rues scolaires » ont vu le jour à proximité des établissements Benoît Malon, Marius Jacotot et de l’école des Bergères. Deux nouvelles écoles bénéficient de ce dispositif. L’école Pyramide (rue Francis de Préssensé piétonnisée dans sa portion à sens unique jusqu’à la rue Ampère. L’école Parmentier (rue Gerhard piétonnisée dans sa portion comprise entre les rues Pitois et Agathe). La fermeture de la circulation est effective les jours d’école entre 8h10 et 8h40 et entre 16h20 et 16h50. L’école privée Saint-Joseph bénéficie aussi de ce dispositif, dans la rue des Pavillons entre les rues Godefroy et Guibert.
#3 : La ville de Sèvres
Entre 2022 et 2025, Sèvres a progressivement aménagé 4 rues scolaires sur le modèle de la fermeture temporaire. L’objectif est d’apaiser la circulation et le dépôt des enfants à l’école. Le dispositif est progressif. Chaque année, la ville aménage de nouvelles rues, fort des retours positifs des parents et riverains sur les rues précédentes.
En avril 2025, la Ville a mis en place une nouvelle « rue scolaire » dans le quartier Croix-Bosset. La sécurisation concerne les écoles élémentaire Croix-Bosset et maternelle Goéland et Pingouin. La mairie a installé une barrière rue Croix-Bosset, à l’angle de la rue Fréville-Le-Vingt. Un agent municipal ferme la barrière chaque matin de 8h10 à 8h30 les jours d’école. Les véhicules de secours peuvent toujours circuler durant ce créneau. Les riverains peuvent sortir leur véhicule si besoin, mais la mairie les invite à adapter leurs habitudes.
Un dispositif plébiscité par les habitants
Ce dispositif vise à renforcer la sécurité des piétons, en particulier celle des enfants. Il vise aussi à encourager les déplacements doux comme la marche, le vélo ou la trottinette. Il contribue également à réduire les nuisances sonores et à instaurer un climat plus serein aux abords des écoles. Le questionnaire proposé à l’issue de la période de test montre un résultat sans appel. 96,5% des usagers souhaitent voir la rue scolaire Croix-Bosset perdurer !
La mise en place de cette nouvelle rue scolaire s’appuie sur l’expérience positive menée fin 2022. La ville avait aménagé les écoles Gambetta et la crèche de la Roseraie. Lors de cette première expérimentation, 91,3% des usagers interrogés avaient exprimé leur souhait de pérenniser le dispositif. Cela avait permis d’augmenter la part des déplacements à pied ou à vélo tout en diminuant l’usage de la voiture. Les retours faisaient état d’un environnement plus calme et apaisé pour tous.
Voir aussi : vidéo de présentation de la rue scolaire Gambetta


#4 Boulogne-Billancourt
Depuis 2019, les associations de parents d’élèves et les associations de sécurité routière demandent une sécurisation des rues scolaires Boulonnaises. Le trafic de transit affecte particulièrement les rues de Boulogne. Chaque jour, plus de 100.000 véhicules de transit traversent la ville. Cele ne concerne pas uniquement sur les grands axes. De nombreux conducteurs utilisent des applications GPS pour trouver des raccourcis. Ils passent par les petites rues résidentielles où se trouvent les écoles.
Autre problème remonté par les associations, la présence de camions devant les écoles à l’heure des écoliers. Ces véhicules ayant des angles morts sont particulièrement dangereux pour les enfants y compris quand le feu piéton est vert. La présence de camions a été documentée sur les réseaux sociaux par de nombreuses vidéos. La plupart des écoles de la ville sont concernées par la présence de camions de nettoyage ou de livraison. Les chauffeurs n’hésitent pas à faire des manoeuvre dangereuses à monter sur les trottoirs ou à se garer sur les passages piétons pour livrer. En particulier, on se souvient du cas de la petite Sixtine tuée dans le 16e arrondissement de Paris ou du jeune Adam tué en plein centre ville de Boulogne par un camion de nettoyage de la ville.
Une demande des parents d’élèves
En 2023, les parents d’élèves de l’école Escudier ont organisé une manifestation avec la FCPE, la PEEP et l’association RESPIRE ainsi que l’antenne boulonnaise de MDB. L’objectif était de demander une rue scolaire et fermer la circulation entre 8h10 et 8h40. Mais le maire Pierre-Christophe Baguet a répondu en réunion publique que, selon lui, il était normal qu’il y ait des véhicules dans les rues des écoles. Il refuse toute contrainte sur la circulation des véhicules motorisées.
À la rentrée 2025, la mairie a présenté un dispositif de passages piétons lumineux qui s’allument au passage d’un piéton. Mais cela n’empêche pas la présence de camion devant l’école à 8h20 et même de livreurs qui bloquent les passages piétons. Ce dispositif lumineux a déjà été testé à la Défense où il est tombé en panne au bout de quelques mois. Pareillement, Issy-les-Moulineaux a testé le dispositif lumineux où il a connu le même destin. Le Cerema a réalisé une étude vidéo sur le dispositif montrant qu’il n’avait pas effet sur le comportement des conducteurs et la sécurité des usagers vulnérables.
Une mortalité endémique
La sécurité routière reste un problème à Boulogne-Billancourt qui fait partie des villes les plus dangereuses d’Île-de-France. La ville subit en moyenne 2 morts par an depuis 15 ans. Les piétons et des enfants en centre ville sont les principales victimes à cause des camions. Et il y a aussi des motards sur les quais de Seine à cause d’excès de vitesse. Les camions bloquant le chemin des écoliers ne sont pas des cas isolés, c’est le quotidien des Boulonnais et une source de danger récurrente. Le phénomène est largement documenté et la mairie a été alertée à plusieurs reprises y compris dans des rapports publics du CESEL. Mais malgré cela, la mairie refuse toujours d’ajouter les places de livraison qui manquent et de réduire la circulation devant les écoles.



Les »rues scolaires » plébiscités
L’enquête menée par l’Unicef en 2020, sur un échantillon de 500 parents habitant dans des villes de plus de 100 000 habitants, annonçait déjà la même tendance, avec 87 % d’entre eux favorables à la mise en place d’une rue scolaire aux abords de l’établissement de leurs enfants. Les raisons principales évoquées étaient la baisse de la pollution et la sécurité routière.
Malgré tout, pour l’expert de l’Ademe, la mobilité scolaire reste « un angle mort des politiques publiques ». « Il y a encore énormément de rues avec des écoles où c’est la foire au stationnement anarchique, avec ce cercle vicieux : les parents considèrent que c’est dangereux d’emmener leurs enfants à pied, alors ils viennent en voiture, donc il y a de plus en plus de voitures et donc c’est de plus en plus dangereux. À l’inverse, avec une rue scolaire, on développe un cercle vertueux tout en développant l’autonomie des enfants. Or, la mobilité s’apprend dès le plus jeune âge, s’ils sont habitués à se déplacer à pied ou à vélo, ils continueront adultes. »
Le Cerema, agence nationale en charge de l’aménagement du territoire, préconise les dispositifs de rues scolaires en version temporaire ou définitive pour apaiser les rues des écoles et transformer positivement les trajets domicile – école en améliorant la santé des enfants.
À l’internationale également
Londres, qui a largement développé le concept depuis avril 2020 avec plus de 350 rues scolaires, a mené une étude sur un échantillon de 35 écoles concernées. Elle a montré que 30 % des parents automobilistes ont réduit leur utilisation de la voiture pour amener leurs enfants à l’école. On observe une diminution de la pollution aux oxydes d’azote, polluants principalement émis par le trafic routier : jusqu’à – 23 % pour les concentrations de dioxyde d’azote et jusqu’à – 34 % pour les concentrations de monoxyde d’azote.
Des réflexions sont désormais en cours pour favoriser la marche des collégiens vers leur établissement ou encore des écoliers vers leurs activités périscolaires, en réduisant l’usage du bus.
