Mieux se Déplacer à Bicyclette

Conférence du climat à Bonneuil-sur-Marne

En 2021, Bonneuil-sur-Marne obtenait la meilleure note des villes de la Métropole du Grand Paris au baromètre de la FUB. Un score obtenu de justesse (il faut 50 réponses pour être qualifiée et Bonneuil en a obtenu 56, alors que des villes de taille similaire ont obtenu plusieurs centaines de réponses) et qui m’avait surpris car je n’avais pas l’impression d’y voir beaucoup de cyclistes quand je traverse Bonneuil à vélo, chaque semaine.

Forte de cette reconnaissance et d’initiatives en faveur du climat, elle organisait du 16 novembre au 9 décembre 2022 une Conférence municipale pour le climat dans l’objectif d’associer les habitant·e·s à l’effort commun pour lutter contre le réchauffement climatique. Pendant un mois, divers ateliers ont animé la ville afin que chacun·e puisse proposer des solutions. Le transport étant l’un des principaux secteurs d’émissions de gaz à effet de serre, un atelier y était évidement consacré avec une table ronde intitulée « Améliorer l’accès à toute notre ville à vélo ».

Vendredi 2 décembre, j’ai participé à une balade exploratoire pour faire le diagnostic vélo de la commune. Malgré les progrès, personne ne peut dire qu’il est parfaitement agréable de se déplacer à bicyclette à Bonneuil.

Le parcours du diagnostic réalisé à vélo à Bonneuil

Une Ville volontaire et des enjeux importants

On ne présente plus les atouts du vélo comme mode de déplacement. À Bonneuil, ils sont d’autant plus importants lorsque l’on regarde la situation de la ville :

Avec un taux de pauvreté de 22% en 2019, il est urgent de proposer un mode de déplacement économique alors que le prix de l’énergie, et notamment du carburant, explose. Le prix des transports en commun ne devrait qu’augmenter. Un élu de la majorité, convaincu de la nécessité de développer le vélo, s’alarmait des problèmes de santé auxquels font face les plus modestes, notamment l’obésité. L’incitation à une activité physique même modérée est donc cruciale.

La majorité des trajets de moins de 4km depuis Bonneuil reste effectuée en voiture, principalement vers Créteil, ville limitrophe ! Mais alors, pourquoi les Bonneuillois·es n’essaient pas le vélo ?

Deux routes majeures

Deux axes urbains importants relient les deux villes, la RD19 et la RD1. Sur chacune d’entre elles, une piste bidirectionnelle existe.

Stupéfiant : la sortie du restaurant se fait directement sur la route/piste cyclable !

La piste sur la RD1 est mal conçue et n’incite pas à pédaler : aux carrefours, les cyclistes sont renvoyés sur le trottoir. Les traversées en deux temps n’aident pas, avec des chicanes forçant le cycliste à rouler au pas. La répétition de ces obstacles coûte à l’attractivité du vélo !

Sur la RD19, la piste est bien meilleure. Elle bénéficie d’une bonne continuité aux différentes intersections, bien qu’il soit possible d’améliorer la distinction entre l’espace piéton et l’espace cyclable, en particulier à la sortie d’un restaurant où le trottoir disparaît : on ouvre la porte et sort directement sur la piste bidirectionnelle, qui est ici une contre-allée utilisée par les résidents… et pas mal de stationnement sauvage. Les participants à l’atelier « améliorer la vie des piétons » du soir demandent également à ce que les pistes soient colorées. En beige comme sur la D1, ou en rouge comme sur la D130 ?

Enfin, sur le carrefour de la Résistance, à l’intersection de la RD1 (qui accueille le bus 393 en site propre) et de la RD19, les piétons et cyclistes doivent appuyer sur un bouton pour bénéficier du passage au feu vert… qui n’arrive jamais vraiment. Traverser le carrefour en diagonale peut bien prendre 3 bonnes minutes !

Créer un réseau, même imparfait

La commune et le territoire ont engagé plusieurs chantiers de création de pistes cyclables sur la voirie communale. Actuellement, des travaux sur la rue Jean Moulin permettront de relier deux nouvelles pistes (avenues d’Oradour sur Glane et de Verdun). C’est une très bonne chose pour créer un véritable réseau qui rend le vélo accessible à tous les publics. La gestion des intersections n’est pas optimale – loin de là ! – mais on voit la volonté de créer une continuité du réseau.

L’importance de l’entretien

Une fois que les pistes existent, encore faut-il les entretenir. On le répète chaque automne, le déblaiement des feuilles mortes est crucial pour limiter les risques de chute. Ce n’est pas encore le cas sur la D19 : les cyclistes doivent pouvoir circuler dans les deux sens ! Sur la RD1, des travaux de voirie sur la piste finissent par un recouvrement au mépris des choix (bons !) d’enrobé coloré : les piétons s’en plaignent, les automobilistes voient moins la continuité cyclable et les cyclistes en pâtissent.

La sacro-sainte voiture

Si je devais retenir un fait marquant de l’atelier consacré au vélo organisé avec les habitants, c’est la vitesse à laquelle le sujet de la voiture est apparu et s’est imposé. Tous les participants sont d’accord pour agir en faveur du climat, mais sont bien conscients de la nécessité pour cela de réduire la place de la voiture, et notamment le nombre de places de stationnement, pour créer des pistes et du stationnement vélo. Et ça, c’est tout de suite moins consensuel.

Car si la suppression du stationnement automobile est parfois liée à une obligation légale à venir, le remplacement d’un emplacement voiture par un emplacement vélos est mal vécu, surtout que les arceaux restent pour le moment peu utilisés.

Une histoire de poule et d’oeuf. Qui arrivera en premier à Bonneuil, les cyclistes quotidiens ou les aménagements ? J’espère que la municipalité n’attendra pas pour agir !

«Together We Cycle», projection-rencontre le 18 Mai à 19h avec Stein van Oosteren à l’Académie du Climat à Paris

Le film “Together We Cycle” (du réalisateur néerlandais Gertjan Hulster), retrace le développement du système vélo aux Pays-Bas. Avec la participation de Stein van Oosteren, porte-parole du Collectif Vélo Ile-de-France.

La pratique du vélo comme mode de déplacement au quotidien a connu une forte accélération ces dernières années à Paris et ailleurs. Au-delà du volet sanitaire, développer la pratique du vélo apparaît aujourd’hui comme une réponse efficace à de nombreux défis actuels : le vélo est léger, peu cher, silencieux, il permet de lutter contre la pollution et la sédentarité.
A l’issue de la projection, venez discuter avec Stein van Oosteren, porte parole du Collectif Vélo Ile-de-France, et conférencier.

A l’Académie du Climat, 2 place Baudoyer, 75004 PARIS

Flambée des prix du pétrole : quelles solutions ?

Actualités

Le prix de l’essence flambe et en tant qu’association cycliste, le plus simple serait de ne pas en parler.

De ne pas en parler, d’abord pour éviter de nous faire immédiatement traiter de bobos, de Parisiens, de CSP+ coupés des réalités que vivent les Français et d’autres insultes. De ne pas en parler, aussi pour ne pas avoir l’air de nous réjouir en creux d’une actualité, qui pour ceux (minoritaires) qui dans la communauté cycliste ont totalement abandonné l’usage d’une voiture ne les concerne pas.
Pour autant, ne pas en parler, c’est ne pas mettre le doigt sur ce système voiture basé sur une essence relativement bon marché dont dépend la vie d’une très grande majorité de Français et structure l’organisation du territoire.

C’est ce système voiture-essence bon marché qui permet aux ménages d’habiter à 25 kilomètres de leur travail, de faire 20 kilomètres pour aller faire leurs courses dans un hypermarché, ou bien encore 15 kilomètres pour emmener leurs enfants à une activité.

Ce système voiture est encouragé par les choix de politiques publiques qui favorisent l’étalement urbain appuyé par des infrastructures routières rapides (contournement routiers, autoroutes) pour allonger les distances parcourues sans allonger les temps de trajets. Les pouvoirs publics enferment ainsi encore un peu plus les ménages dans des choix de vie qui rendent la voiture obligatoire et son utilisation, intensive. C’est ce que l’augmentation du prix de l’essence vient brutalement nous rappeler : en France, aucune inflexion n’a été donnée au système voiture-essence bon marché (malgré les chocs pétroliers, les gilets jaunes…). Or, ce modèle est aujourd’hui à bout de souffle.

À bout de souffle car sensible au moindre soubresaut économique ou géopolitique et intenable sur le plan environnemental et climatique. Cette tension, c’est celle que vivent aujourd’hui la grande majorité des Français qui dépendent du système voiture. L’enjeu est donc de faire en sorte de sortir de la dépendance toutes celles et ceux qui aujourd’hui sont enfermés dans le système voiture. Cela implique à la fois une action collective et une réflexion individuelle sur nos choix de vie.

Action collective, pour créer des territoires qui ne soient pas dépendants de la voiture/essence bon marché. Réflexion individuelle, pour changer notre approche de la mobilité. Cela veut dire développer la possibilité de faire du vélo, ce qui est aujourd’hui tout simplement impossible, même pour des courtes distances, dès qu’on sort des zones urbaines du fait de la dangerosité des routes et de l’absence de pistes cyclables. C’est aussi développer l’offre de transports collectifs et l’intermodalité, y compris avec du covoiturage ou des véhicules partagées pour les territoires moins denses. C’est, enfin, réguler l’urbanisation en refusant la création de nouveaux centres commerciaux en périphéries et l’étalement résidentiel périurbain non maîtrisé et surtout arrêter le développement du réseau routier qui appuie cet étalement.

Cette action collective ne peut fonctionner sans une réflexion individuelle sur notre mobilité. Il n’est pas possible du jour au lendemain de bouleverser nos habitudes mais ce questionnement est indispensable. Comment relocaliser nos vies ? Comment moins prendre sa voiture ? Certaines mobilités alternatives sont-elles possibles pour moi dès maintenant ? Ces questions nous devons tous nous les poser si nous voulons sortir du système voiture.

Évidemment, il est plus facile de se poser ces questions quand on a le choix que sous la contrainte économique d’une flambée des prix de l’essence. Pour autant, les crises, on l’a vu avec le COVID, sont aussi des moments qui provoquent le changement. La crise peut donc avoir du bon si elle nous amène à questionner ce qui nous semblait la norme. Si elle nous amène notamment à mieux prendre en compte le coût de l’énergie (financier et environnemental) quand nous décidons où habiter.

Jusqu’à quelle distance est-il raisonnable d’habiter de son travail ? Quels sont les coûts associés ? Quels sont les alternatives possibles à la voiture (transports en commun, vélo) ? Autant de questions que chacun devrait se poser pour éviter des choix qui enferment encore plus dans un système voiture qui ne peut être durable sur le plan climatique mais aussi économique.


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