n°80 (juillet-août 2004)

Un préfet sourd

Oui, cela se confirme : le préfet de police est vraiment sourd, en tout cas aux demandes des associations. Celles-ci (MDB, Mobile en ville, AUT…), à l’initiative de Réseau vert, avaient pourtant fait un gros effort le samedi 24 avril, en cherchant à le rencontrer pour lui offrir un cadeau destiné à soigner sa surdité : un gros cornet acoustique en carton.

Malheureusement, non seulement le préfet n’a jugé bon de recevoir ni son cadeau ni les représentants des associations, mais il avait délégué bon nombre de représentants de forces de l’ordre pour nous empêcher de traverser le bras de la Seine séparant le boulevard Saint-Michel de la préfecture. Après une demi-heure d’attente, il nous fut confirmé qu’aucune délégation ne serait reçue par le préfet. Nous avons donc dû nous contenter d’une mini-manifestation sur la voie publique, expliquant aux passants les raisons de notre mécontentement : le laxisme de la police face au stationnement sauvage sur les pistes cyclables, couloirs de bus et espaces réservés aux handicapés.

Ce refus de nous recevoir fait suite à un silence total après des demandes répétées de rencontre, accompagnant les manifestations « J’en ai pour deux minutes ». Le préfet cette année s’est vu préférer la SNCF pour l’attribution par la FUBicy du « Vieux clou rouillé ». Nul doute qu’il sera de nouveau candidat l’année prochaine…

De l’influence de la météo sur la mobilisation

Deux samedis de mai très différents du point de vue des conditions climatiques, mais très voisins sur les activités MDBistes puisqu’il s’agissait de renouveler l’opération de décembre dernier en allant poser des panneaux pour baliser les contresens cyclables que nous appelons de nos vœux.

Eh bien figurez-vous que c’est le samedi pluvieux qui a eu le plus de succès. Après une matinée de travaux manuels au local pour préparer les panonceaux « sauf cyclistes », une bonne vingtaine de joyeux militants a bravé une pluie diluvienne pour se rendre dans le XIIIe arrondissement, dans le futur quartier vert des Peupliers, autour de la rue du même nom. Ils y ont été accueillis par deux élus de l’arrondissement, Mylène Stambouli et Jean-François Pellissier, puis ont entrepris de poser leurs panonceaux plus de magnifiques panneaux indiquant aux automobilistes qu’ils risquent de croiser des cyclistes. À noter que le zèle de ma maréchaussée a peut-être, lui, été freiné par les intempéries, puisque les panneaux sont restés plus longtemps que lors de la première opération dans le XIVe.

De l’art d’utiliser les restes

Le 15 mai c’est dans le quartier vert du Xe arrondissement (Paradis-Faubourg-Saint-Denis) que le matériel restant a trouvé son usage. Les militants se sont retrouvés devant la mairie d’arrondissement sous un beau soleil cette fois, et avec la présence et le soutien de l’infatigable Charlotte Nenner, qui par la même occasion nous a annoncé de bonnes nouvelles, puisque de véritables contresens vont être mis en place de façon tout à fait officielle dans le quartier, rue du Château-d’Eau et rue du Faubourg-Saint-Denis. Si les poseurs de panneaux étaient moins nombreux ils n’étaient pas moins motivés qu’une semaine auparavant et à midi les contresens étaient nombreux du côté des Petites-Écuries et du Faubourg-Saint-Denis.

Et si l’on restait dans le Xe pour une autre bonne nouvelle : le projet d’aménagement du boulevard Magenta a été présenté lors d’une réunion publique le 3 juin, et la transformation annoncée d’une autoroute urbaine en un « espace civilisé », avec une réduction significative de la place dévolue à la voiture, est tout à fait réjouissante.

Des réunions houleuses…

S’il est des arrondissements, comme le 10e, où les choses se passent plutôt bien, il en est d’autres où les réunions de concertations sont houleuses et où les débats musclés ne sont pas loin de tourner au pugilat. Une jeune adhérente qui a assisté à l’une d’elles dans le 12e en a fait un récit épique sur notre liste de discussion. « Les interventions allaient du poujadisme minable à l’agressivité insultante, en passant par les petites remarques perfides », nous dit-elle.

Pourtant, envers et contre tout, le travail avance. Le projet d’aménagement cyclable de l’avenue Daumesnil, entre la fin de l’aménagement actuel (au niveau des rues Brahms et Dugommier) et la porte Dorée (franchissement du périph. compris) est en bonne voie.
Par rapport à ce qui a été évoqué (Roue libre 79), c’est l’hypothèse 4 (deux pistes sur chaussée) qui a été retenue : piste en site propre avec séparateur large de 0,40 m (si pas de stationnement) ou 0,70 m (si stationnement). La seule partie sur trottoir se situe devant le musée des Arts africains et océaniens, à un endroit où ce trottoir est large. Il y aura une courte section de couloir bus-vélo au sud-est de la place Félix Eboué, dans le sens entrant et un contournement de la place Félix-Eboué par le nord, bidirectionnel, sécurisé, pour cyclistes ; un autre contournement par le sud, dans le sens sortant uniquement, neutralisé les jours de marché. Le projet supprime environ 100 places de stationnement dans l’avenue Daumesnil, mais 80 nouvelles places vont être créées dans des rues voisines.

Le XIIe n’est qu’un avant-goût. On s’attaque maintenant à des arrondissements « lourds » : VIIIe, XVIIe et XVe. Dans le XVIIe, Mme le Maire adore se montrer juchée sur des rollers, mais des pistes cyclables dans son arrondissement, c’est autre chose. La réunion du 14 juin, dont le sujet était l’aménagement du tronçon nord des boulevards dits des Fermiers généraux, laisse augurer des combats homériques. Pourtant il s’agit d’un aménagement bien modeste, qui ne prend que peu de place à la voiture et ne pose pas de réelles difficultés.

… à la révolte sur le pavé

Dans le XVe arrondissement, c’est la piste cyclable des boulevards Garibaldi et de Grenelle qui a provoqué une levée de boucliers. Le lundi 10 mai, jour prévu pour le début du chantier, une quarantaine de riverains et commerçants du quartier, appuyés par des élus de l’arrondissement, se sont mobilisés pour empêcher le démarrage des travaux en se rendant sur place tôt le matin. Alertés par Vélo XVetVII, quelques représentants d’associations sont venus aussi pour faire valoir le point de vue des cyclistes, mais la discussion a vite tourné au dialogue de sourds. Les opposants à la piste cyclable ayant renouvelé leur action tous les matins, le jeudi suivant Denis Baupin, quelques élus de l’opposition au maire du XVe, Jean-Luc Marchal et des représentants de la voirie sont venus à leur tour constater l’obstruction et l’opposition à une décision prise par le Conseil de Paris. Des militants de MDB étaient là également pour redire leur soutien à ce projet. Pour l’occasion les commerçants avaient fabriqué des pancartes où figuraient leurs slogans favoris, disant, pour résumer : le vélo, ça pollue (puisque ça crée des embouteillages) ; ça tue le commerce ; malgré tout on veut bien des pistes cyclables, mais pas chez nous, ce serait tellement mieux dans l’arrondssement voisin…

La guéguerre a continué ainsi jusqu’au week-end de l’Ascension, avec distribution de tracts sur les marchés, tractage contradictoire par quelques militants cyclistes sur le thème « le vélo, c’est bon pour le commerce », jusqu’à ce que l’affaire se tasse et que les travaux puissent reprendre dans des conditions normales. Il faut s’attendre à ce que de telles situations se reproduisent car certains commerçants, emmenés par un personnage qui s’est découvert une âme de chevalier blanc du petit commere, et les partisans du tout-voiture en général, sentant la pression devenir plus forte, vont se mobiliser de plus en plus durement. Ce qu’on peut espérer, c’est que les cyclistes sauront eux aussi se mobiliser davantage.

Réunion du 10 mai avec les représentants de la SNCF

Les associations (4,50 m, FNAUT, FUBicy, MDB, Réseau Vert, UTAN, FFCT, etc.) ont été reçues par des représentants de la SNCF, et une entrevue avec le directeur du développement a eu lieu le 23 juin. Voir p. 8 l’article de Camille Lalande.

Pour le matériel, les réponses de la SNCF sont plutôt positives (TGV Atlantique ; nouveaux Corail Téoz ; TER. Néanmoins, de nombreux problèmes demeurent. Dans certains trains de nuit il est impossible d’attacher son vélo dans le compartiment-vélos. Les Grandes Lignes non-Teoz semblent abandonnées et la simple transformation d’un compartiment en « espace vélo » ne paraît guère motiver la SNCF. Pour la tarification, en dépit de nos demandes (un tarif pour petit parcours et un pour grand parcours), la SNCF a choisi : 0 euro sur ligne « de service public » et 10 euros sur lignes concurrentielles. Par ailleurs, la différence de tarification entre vente par Internet et vente au guichet est préjudiciable aux cyclistes puisqu’ils ne peuvent acheter une place vélo par le site web. Deux solutions sont à l’étude : soit l’achat indépendant de la place vélo, soit le développement de la vente des places vélos sur le site web.

Comité de pilotage

Le comité de pilotage vélo s’est réuni le 18 mai sous la présidence de Denis Baupin.

En préambule, entre autres informations ponctuelles, l’accord de la préfecture de police pour l’expérimentation de 7 contresens cyclables sans aménagement est confirmé.

Denis Baupin a réagi aux attaques dont il a fait l’objet après sa dernière conférence de presse. Les représentants de plusieurs associations ont répété qu’ils contestent les chiffres annoncés et demandent qu’on arrive enfin à une façon de comptabiliser les kilomètres qui soit la même pour tous. Il a été décidé d’organiser une réunion à cette fin.

Quatre projets d’aménagements cyclables ont été ensuite présentés par les services de la Voirie.

 Liaison Seine – Cité universitaire par la rue St-Jacques dans le sens nord-sud, le sens inverse étant celui du Mobilien 38. Une piste cyclable est prévue avec séparateur et stationnement décalé partout où c’est possible, les vélos étant ramenés vers les voitures aux carrefours (avec système empêchant le stationnement sauvage des voitures à ces endroits). Certains passages (rue Saint-Jacques trop étroite par moments, Val-de-Grâce veillé par les ABF, etc.) ne permettront qu’une simple bande. Rue de la Tombe-Issoire (entre l’avenue René-Coty et le boulevard Saint-Jacques), un contresens cyclable dans le sens sud-nord est préféré à une piste bidirectionnelle.

 Liaison porte Dauphine-porte Maillot-Ternes. On est dans le domaine de la voiture reine. Il n’est pas question de faire passer une piste cyclable devant le palais des Congrès pour rejoindre l’avenue de Neuilly. Bd Gouvion St-Cyr il y a beaucoup d’hôtels, avec dépose-minute, etc. Seule solution : une piste bidirectionnelle axiale ! Ce n’est pas vraiment l’idéal du cycliste mais la situation est si difficile (en dépit de quelques efforts) que, quoi qu’on fasse, ce sera une amélioration. Porte Maillot, une solution consiste à emprunter des passages souterrains qui seraient réaménagés, mais elle ne suscite pas l’enthousiasme. Bd de l’Amiral Bruix : cohabitation avec les bus. La préférence est donnée à une voie de bus élargie (plutôt qu’une piste séparée sur trottoir) pour préserver la possibilité d’un aménagement « Mobilien ».

 Itinéraire pont Charles-de-Gaulle- bd Henri-IV par le bd Morland: L’idée proposée est une piste bidirectionnelle avec la volonté de marquer un aménagement cycliste continu bien « visible » le long de la Seine. Bonne idée mais il faut aussi considérer les besoins spécifiques des cyclistes n’utilisant qu’une partie de ce parcours et venant d’ailleurs (de la gare de Lyon par exemple). Plusieurs tracés sont proposés, côté Seine ou côté bâti, chacun ayant de bons et de mauvais aspects. Il faudrait aussi en profiter pour traiter le problème de la sortie de la voie sur berges, endroit assez dangereux.

 Porte de Bagnolet: Gros travail pour permettre un cheminement des vélos dans cet univers impitoyable. Là aussi certains réajustements paraissent nécessaires par rapport au projet proposé. La sécurité des cyclistes serait garantie par de véritables barrières, notamment à proximité d’une plateforme où les poids lourds font demi-tour. Cet aménagement est emblématique du souci de faciliter les liaisons Paris-banlieue ; il serait bienvenu que les associations existant dans les communes limitrophes soient associées à la concertation sur ce projet.

Fête du vélo les 5 et 6 juin

Le premier week-end de juin est traditionnellement dévolu à la fête du vélo. Comme chaque année, il a fallu attendre assez longtemps pour savoir ce qui était organisé et de quelle façon MDB pouvait y être associé. Finalement nous avons profité de l’occasion qui nous était offerte de tenir un stand au « village » installé au parc de Bercy. Lieu excentré, publicité insuffisante, concurrence de la fête des jardins et de la Fête des mères… la foule ne se bousculait pas. Nous avons quand même tenu vaillamment, supporté la sono, vendu autocollants et pinces à vélo, et recruté quelques adhérents.

Le dimanche matin nous avons participé à la balade organisée par la Mairie de Paris et encadrée par la FFCT et Paris Rando Vélo. 900 vélos environ ont fait une très jolie promenade dans Paris. Dommage qu’on ait pris soin d’éviter les boulevards Garibaldi et de Grenelle… Sur le stand, nous avons été gratifiés de la visite du ministre des Sports à qui notre président a rappelé (ou appris ?) que le vélo c’est aussi un moyen de se déplacer quotidiennement. Sport et transport : une fois de plus, se pose le problème de l’amalgame entre ces deux pratiques aux spécificités et aux besoins différents. Bien que cette promenade ait été très bon enfant – avec justement la présence de nombreux enfants, on a pu constater sur le parcours que dans l’esprit du public, vélo = course. Il y a encore beaucoup de travail d’information et on peut une fois de plus se demander si l’association avec la FFCT n’est pas contre-productive.
Pour une pratique urbaine, le samedi après-midi a eu lieu l’inauguration de la nouvelle Maison Roue libre – Bastille, boulevard Bourdon. Par rapport au programme annoncé, on ne peut pas dire qu’elle arrive en avance et elle se sent encore un peu seule, mais elle devrait être rapidment suivie par deux autres, à la porte Dorée et au métro Jaurès. La maison Roue libre Paris est ouverte par la mairie de paris et fonctionne exactement comme celles de la RATP. Pour le moment seuls la location et le gardiennage sont proposés mais par la suite on pourra faire réparer ou graver son vélo.

Après cette inauguration Denis Baupin s’est transporté (à vélo) dans le 2e arrondissemnt pour une visite de terrain dans le quartier Montorgueil : là, surprise, fes panonceaux « sauf cyclistes » fleurissent sous les panneaux sens interdits, et ce sont des vrais ! Aucun militant MDB n’est venu se contorsionner pour les poser. On peut sourire sur le fait que cette mesure ne fait qu’entériner une pratique en usage depuis longtemps, il n’empêche que l’idée du contresens cyclable fait son chemin, à contresens, si l’on ose dire, de celles qui ont encore cours chez les défenseurs de l’automobile : voir leurs réactions dans la revue de presse.

5 juin, jour de manif(s)

Une centaine de manifestants (dont trois ou quatre de MDB) sont partis à l’appel de Vélorution au milieu des différentes manifs de ce samedi 5 juin pour protester contre le refus de Bush et Poutine de cosigner le protocole de Kyoto, donc leur refus de lutter contre l’envahissement de la voiture. Après un détour par la mairie du XIXe ou des manifestants anti-pub avaient réalisé une piste cyclable matérialisées par des affiches publicitaires consacrées à la bagnole, la petite troupe réduite à une cinquantaine a rejoint la place de la Bastille d’où partaient au même moment d’autres manifestations.

Des nouvelles de la banlieue

Jean-Paul Grange, adhérent du Val-de-Marne, s’emploie à faire avancer la cause du vélo au sein de la Communauté d’Agglomération de la Plaine Centrale du Val-de-Marne (CAPCVM). Lors d’une première réunion des priorités ont été établies. L’usage du vélo et l’intermodalité ne sont possibles que si les usagers disposent de parkings à vélos sûrs. Les flux de personnes permettent d’identifier les emplacements les plus favorables pour ces parkings, puis de définir les pistes cyclables prioritaires.

Il apparaît nécessaire de créer un parking à Créteil-Préfecture car le volume de personnes dans un rayon de 2 à 5 kilomètre est très important. Même chose à Créteil-L’Echat où le parking peut être facilement surveillé par l’employé des bus.

Fin 2004 commencera une enquête concernant le Pôle Intermodal de Pompadour. Une gare sera créée à ce rond-point (Gare du RER D Pompadour). Elle verra passer aussi le TVM et le TCSP (bus venant de Sucy-Bonneuil RER A). Il est prévu un abri à vélo pour l’instant. Il faudra demander un parking gardé accessible aux heures de circulation du RER D. L’étude devra inclure la population habitant ou travaillant dans un rayon de 5 km autour de cette gare. Exemple : l’Europarc est à 10 minutes en vélo.

Françoise Clausse

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